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Sur les traces de l'effacement - EFFACER, ENLEVER

«Tout doit s'effacer, tout s'effacera (…). La longue, l'interminable phrase du désastre, voilà ce qui cherche, formant énigme, à s'écrire»

Maurice Blanchot, L'écriture du désastre (1980)

Pour divers motifs, selon de multiples démarches, suivant différentes techniques, certains artistes ont fait de l'effacement une pratique artistique. Effacer ce qui efface ou faire disparaitre pour faire apparaitre, donner à voir le silence, le retrait ou la solitude, accompagner l'érosion du langage (y compris pictural) sous la coulée continue du réel, révéler une beauté terrible, etc. telles sont quelques unes des voies suivies par ces "artistes effaceurs".


Ne rentrent évidemment pas dans cette catégorie des gestes qui eurent ou ont encore pour objet des œuvres et pour projet leur disparition. On pense ici aux autodafés ou au tentations destructrices de groupes radicaux.


Robert Rauschenberg


En 1953, Robert Rauschenberg réalise un tableau à partir de l'effacement d'une œuvre de Willem De Kooning. Cette œuvre, dont le titre explicite est Erased De Kooning Drawing, offre au regard une feuille de papier quasi vierge, seule quelques traces du dessin original demeurent, malgré l'utilisation par Rauschenberg de toutes sortes de gommes. «Cela me parut une œuvre d'art tout à fait légitime, obtenue à partir d'un effaçage» déclare l'artiste (Robert Rauschenberg, Conceptual Art and Conceptual Aspect, The New York Cultural Center, 1970). Effacer l'image du père (avec sa permission) c'est en même temps s'effacer devant lui (Jean-Yves Jouannais, Artistes sans œuvres; I would prefer not to, Paris, Verticales, 2009, pp. 170-171). figure la à la fois nécessaire et insuffisante pour créer autant qu'elle renvoi au poncif de l'artiste qui s'efface devant son œuvre.


Pour autant, l'artiste n'est pas absent. Le silence de l'image parle de son fantôme. Il y a un geste, une mise en œuvre de diverses techniques pour arriver au résultat final qui est le vide (objet de la proposition artistique). Ces techniques ne sont pas immédiatement visibles car s'effaçant devant ce qui est à voir. Une intervention plus discrète sans doute qu'une certaine tendance actuelle dans l'art contemporain qui met en exergue les gestes (de l’artiste ou de l'artisan) et les matériaux, mais néanmoins survivante dans le résultat final.

Robert Rauschenberg, Erased de Kooning Drawing (1953) © Robert Rauschenberg Foundation / Licensed by VAGA, New York, NY

Robert Rauschenberg - Erased de Kooning Drawing (1953) © Robert Rauschenberg Foundation / Licensed by VAGA, New York, NY

Marco De Sanctis

Dans sa série Marine, Marco De Sanctis retire certaines couches picturales de vieilles marines du 19e et 20e siècle. La peinture grattée et l'image encadrée vise à (ré)affirmer la dimension matérielle de la peinture, c'est-à-dire le support de la toile et la technique utilisée. Il ne reste plus qu'un fragment de la représentation originale qui en devient presque abstraite. L'image fut, mais n'est plus. Ce qui rappelle un autre travail de l'artiste: L'idée qui fut (2014). Ici des toiles trouvées dans un atelier à Bruxelles et préparés au début du 19e siècle mais jamais peintes, ont été grattées superficiellement afin de rendre visible le tissu sous-jacent et de faire apparaitre la formule "l'idée qui fut".

Marco De Sanctis, Marine #2 (2015) Courstesy de l'artiste

Marco De Sanctis - Marine #2 (2015) Courstesy de l'artiste

François De Coninck

François De Coninck efface, lui, la première page du quotidien dans un œuvre intitulée Vous êtes (2015). Sur cette "une" effacée est cacheté en rouge un sigle indiquant la position de l'individu sur une carte. Mais ce sigle est également soumis à l'effacement et, loin de permettre à la personne de s'orienter, il provoque un état de latence. "Ici" a quasiment disparu de la surface du où n'apparait plus qu'un vague "vous êtes".

François De Coninck, Vous êtes (2015) Courtesy de l'artiste

François De Coninck - Vous êtes (2015) Courtesy de l'artiste

Fabrice Samyn

Fabrice Samyn déverni partiellement et de façon très ordonnée d’anciennes peintures à l’huile dont il n’est pas l’auteur. Les extirpant de la saleté accumulée au fil du temps, il ne cherche cependant pas à les nettoyer intégralement. Son action n’est pas motivée par une quelconque restauration mais bien par une volonté de questionner les notions de temps et de sacré et de recréer du sens à partir de son effacement graduel (Cfr. Devrim Bayar et Olivier Meessen, Fabrice Samyn, Selected works Travaux choisis Geselecteerde werken, 2005·2008, Bruxelles, Meessen-De Clercq, 2008).


Deux axes principaux peuvent être dégagés sans pour autant être séparés. L’intervention peut être dictée par l’emplacement de l’œuvre, son lieu de monstration, comme avec l’œuvre A Room into time (1825-2008) sur laquelle on discerne une découpe lumineuse, dévernie, de la forme des croisillons de la fenêtre jouxtant le tableau. Les couches les plus profondes de l'image sont alors révélées, cela ressemble à des réflexions de lumière ou à des rayons X.


Fabrice Samyn - A room into time (ca 1825-2008) Courtesy de L'artiste et de la galerie Meessen De Clercq

Fabrice Samyn - A room into time (ca 1825-2008) Courtesy de L'artiste et de la galerie Meessen De Clercq

Autre exemple, dans sa série Poussière (2006-2008), gomme en main, Fabrice Samyn dessine par effacement dans la saleté accumulée sur les murs, les persiennes closes ou les volets de bâtiments. Un travail qui résonne avec celui de Claudio Parmiggiani.

Fabrice Samyn - Poussière (2006) Courtesy de l'artiste

Fabrice Samyn - Poussière (2006) Courtesy de l'artiste

Son action peut également prendre source dans le sujet même du tableau. C'est le cas de Pupil's Mask (2013) ou de The origin of the world (2010). Pour cette dernière œuvre, l'artiste a déplacé les blessures du Christ dans le voisinage des organes génitaux féminins. Les rayures sur la peinture semblent ainsi renvoyer soit à une forme de censure (voir plus loin) ou alors aux traces des touches révérencieux qui couvrent des reliques votives.

Fabrice Samyn - The origin of the world (2010) Courtesy de l'artiste et de la galerie Meessen de Clercq

Fabrice Samyn - The origin of the world (2010) Courtesy de l'artiste et de la galerie Meessen de Clercq

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